Vidéo - Présentation de Bezannes
Au lecteur,
Encore pénétré du souvenir d’un honorable et laborieux enfant de Bezannes, M. Auguste LE BOURCQ, qui a consacré les studieux loisirs de sa vieillesse à des recherches très approfondies, mais restées inédites, sur l’histoire de son village natal, nous nous plaisons à signaler et à remercier l’auteur de la notice historique sur Bezannes, publication pleine de renseignements rétrospectifs et d’actualité à la fois.
Cet opuscule, que nous venons de parcourir avec autant de plaisir que d’intérêt, permettra à l’habitant comme au visiteur, au citadin en cours de villégiature, à tous ceux qui aime le village de Bezannes, dans le présent comme dans le passé, d’avoir un aperçu de ses annales et de son ancienne seigneurie, un tableau de la vie communale, la liste des productions du terroir, qui forme un résumé de la statistique agricole, l’historique de la paroisse, la description de l’église, enfin la biographie d’utiles et bienfaisantes personnes qui y ont vu le jour ou en ont tiré leur nom. Des vignettes, dues la plupart à M. l’abbé CHEVALIER, curé de Montbré, représentent un vignoble "Le Clos de la maison Blanche", la mairie, une charmante niche avec calvaire de la Renaissance, une taque de l’ancien château, l’écusson de la famille de Bezannes, et la façade de l’église avec son clocher.
Un appendice vient clore le récit et remettre en lumière de vieux documents : la visite de Marie-Antoinette dans une fête militaire au moment du sacre de Louis 16, enfin le baptême de la nouvelle cloche en 1903. Puisse cette dernière sonner longtemps de concert avec l’ancienne cloche, fondue en 1828 et portant le nom de la veuve du baron PONSARDIN, ancien maire de Reims, de concert aussi avec l’esprit des habitants, dans la paix et la concorde des familles !
Un village de la banlieue de Reims, c’est toujours une localité attrayante, pleine d’activité, d’aisance et d’avenir ; nous souhaitons à Bezannes de maintenir son bon renom et tout le charme que nous a retracé cette Notice Historique.
H. JADART
Reims, le 16 décembre 1903.
Dans son topographique du département de la Marne, M. Auguste LONGNON reproduit les différentes formes du nom Bezannes, rencontrées dans les Archives du 11ème et 16ème siècle :
Bisennx, commt du 11e siècle (polypt. de St Rémi)
Besanna, 1066 (Marlot latt.1, p 621)
Bisannx, 1119 (Cart. de l’Archevêché, f °178)
Besanes, 1177 (Saint-Thierry, liasse 1)
Besanx, 1183 (Saint-Rémy, liasse 57)
Besenes, vers 1184 (Arch. adm de Reims, f °339, r °)
Besannx, 1216 (Cart. B du Chap. de Reims, f° 339, r°
Bisannx, 1216 (Chap. de Reims, liasse Ludes)
Bessannx, 1219 (Saint-Symphorien, c.1)
Besannes, 1229 (Cartulaire A de Saint-Remy, p598)
Besennes, commt du 14ème siècle (Arch. adm. de Reims, t.1, p.1090)
Besenne, 1328 (Ibid., t.2, p. 543 )
Besannx, 1332 (Ibid., t.2, p. 663 )
Bezennes, 1357 (Ibid. , t.3, p. 19 )
Bezanne, 1574 (Saint-Remy, liasse 35 )
L’étymologie du nom même de Bezannes serait Ruche à miel, si l’on s’en rapporte à nos vieux glossaires français :
" Il faut voir ses bezeines qui sont de cire et de miel pleines. "
" Environs six bezennes ou paniers de mouchettes " ( RAYNOUARD, Lexique Roman )
"... Il a enlevé six bezennes ou paniers de mouchettes qui pouvoient valoir chacun de six à sept sols. " (1407)
"... trouvèrent une bezanne d’abeilles, la levèrent et en prirent tout le couppeau et miel dedans. " (1460) ( Duglange, Glossarium)
Nous ne nous attarderons pas à en rechercher la véritable origine. Nous allons donner, par ordre chronologique, quelques renseignements que nous avons pu glaner sur le village. Nous les avons relevés dans les divers dossiers conservés aux Archives de Reims. N’ayant pas l’intention, comme nous l’avons dit plus haut, de faire l’historique de Bezannes, nous les énumérons sans corrélation entre eux, heureux seulement de les signaler à ceux qui entreprendront un jour une Monographie complète de notre localité.
1295 (3 février). - Plusieurs fois les rois de France furent obligés de forcer les habitants des communes des environs de Reims de contribuer de leurs deniers à la réparation ou à la reconstruction des murs de Reims. Le 3 février 1295, le roi Philippe-LE-BEL força les habitants des environs de Reims à participer aux frais de la réparation des murs de la ville. Parmi ces communes figurent : Gueux, Besennes, Viler-as-Nex, Chauflori, Cormonstreuil, etc.
1328. - " Ce sont les héritages de la parroche Saint-Jacques et la Magdalaine, en commensant à porte valoisse, en allant à porte Saint-Pierre-[ le Viez ?] et est appelé le quarrel J. de Besenne...."
1337 - Aubert DE ANGEST, chevalier, est commis par le roi Philippe pour visiter les "chastiaux et forteresses de Reims et environs... chastiau de Bezannes".
1357 (novembre). - Lettres de Charles, roi de France, au bailli de Vermandois concernant les fortifications de Reims et la part que doivent y prendre les communes circonvoisines. Un grand nombre de ces villages (600 environ) refusent cette cotisation, mais le roi ordonne de faire lever la somme imposée. Parmi les communes rebelles à la cotisation figurent :
"Beine, Cormontreuil, Villers-Allerand, Thillois, Champigny, Ormes, Villers-aux-Nœuds, Champflory, Rilly, Sacy, Mailly, Chamery, Trois-Puits, Montbré, Villedommange, Bezannes, Coulommes et Marfaux... tous les habitants d’accord pour refuser la participation".
Comme on le voit par un acte du 15 mars 1357, la plupart des villages des environs de Reims étaient tenus de concourir aux frais de réparation ou de reconstruction des murs de Reims, et c’était là, une chose toute naturelle puisque, en temps de guerre, les habitants des pays environnant Reims trouvaient refuge dans les murs de cette ville.
1432. - "Payé à Jehan LE-BRETON. 44 solzs tournois tant en restitution d’un arc d’if et de deux trousses de sayettes qu’il perdit à certaine escarmouche contre les Anglais qui étaient logés à Bezannes, comme pour dépens par luy de certaine blessure qu’il eut en ladite escarmouche".
1465. - le 31 décembre 1465, nous voyons conjointement "Nobles hommes Pierre DE THIUSY et Pierre DE BESANNES" paraître dans l’enquête faite par "Philippe RAUCOURT, tabellion royal et sergent du bailliage de Reims, commissaire en ceste partie député par noble homme et saige Monseigneur le bailli de Reims".
1475. - "..., c’est la déclaration des rentes de vin appelées vinages deuz chacun an a très révérend père en dieu Monseigneur larchevesque duc de Reims premier per de France...par nobles hommes Pierre FERET, receveur du temporal de larchevesche dud. Reims, MILET DE THUISY, Jehan de Besannes, escuiers...le dimanche XIIIe jour de septembre l’an mil cccc soixante quinze..."
1550. - A cette date, la partie de la seigneurie de Montbré qui appartenait à Hutil DE SAULX est échue à Renaud de BESANNES et demeure dans sa descendance jusqu’en 1714. Cette seigneurie consistait en cens, lods, ventes, pressoirs, etc.
1610. - parmi les curieux privilèges des seigneurs de Bezannes, il est dit : " le 17 octobre 1610, au sacre de Louis XIII, le seigneur de Bezannes a l’honneur de présenter au roi à son passage à Gueux, le déjeuner dont le menu était fixé par l’usage, savoir : des œufs frais, du beurre, et des radis..."
1684. - Par sentence arbitrale rendue par Louis DAILLIER et Nicolas MUIRON, avocats en Parlement, le 27 octobre 1684, déposée en l’étude de Me LANBRÉAU, notaire royal à Reims, appert que M. de BEZANNES appartient droit de pressoir banal sur tous les habitants de Bezannes, tant de la seigneurie que d’autres, qu’outre la Seigneurie du château, basse-cour, jardin, bois et enclos dépendant dudit château de Bezannes, il appartiendra audit seigneur de Bezannes en toute justice et seigneurie, une partie du village et terroir de Bezannes détaillés par cantons et figurés au plan qui a pour cet été levé par PLISTA, arpenteur à Reims et qui compose au moins moitié desdits village et terroir est déclaré appartenir aussi en toute justice et seigneurie à l’abbaye royale Saint-Pierre de Reims- et le droit de chasse demeuré commun. (G. 148, terrier de l’Archevêché).
1774. - Comme profession dans notre village, nous trouvons : " dix laboureurs, deux fermiers à M. DE BEZANNES, la plupart vignerons, manouvriers à tâches et petits fonds, le reste journaliers, un tonnelier, un cordonnier, un berger et un maréchal ".
1775 (12 juin). - Grande revue des troupes royales passée par la Reine, lieudit les Vautes, sur le territoire de Bezannes à l’occasion du sacre de Louis XVI. (Voir plus loin à l’Appendice) Le Roi, retenu à Reims par diverses cérémonies, ne put y assister. Voici en quels termes en rend compte la Relation contemporaine du Sacre : " La Reine, accompagnée de Madame, alla le même soir, à une heure de Rheims, voir manœuvrer le régiment d’Esterhazy, Hussard, et parut fort satisfaite de la manière dont il étoit exercé. Monsieur, Monseigneur le Comte d’Artois, le Prince de Condé, le Duc de Chartres et le Duc de Bourbon, assistèrent pareillement à cheval aux mêmes manœuvres. "
1785. - " la vendange de 1785 a été si abondante qu’il y a eu à Bezannes, deux hommées qui ont rapporté plus de 2 poinçons de vins. " (Reg. paroissiaux.)
Décembre 1788. Janvier 1789. - " Le froid a été si rigoureux qu’on a assuré que depuis plus de 80 ans il n’y en a pas eu de pareil, cependant une partie des grains a été conservée par la neige." (Id.)
1788. - Monseigneur de Talleyrand-Périgord, archevêque de Reims, passe un bail de loyer et fermage pour huit années consécutives, avec Jean-Baptiste BOUGY, laboureur, demeurant à Bezannes, conjointement avec sa femme Elisabeth CARANGEOT.
Nous touchons à la Révolution, et dès lors un autre régime va succéder à celui que nous venons d’étudier. On trouvera plus loin les faits relatifs à cette période tourmentée, mais, auparavant, nous allons dire un mot du territoire et de la population de Bezannes aux différents âges.
En 1789, l’esprit public et les exigences du temps réclamaient impérieusement des réformes. Louis XVI ordonna la convocation des États généraux : clergé, noblesse et tiers-état. Chaque communauté devait formuler ses demandes en un cahier de doléances. Voici la requête présentée par les habitants de Bezannes : " Le Roy, qui ne veut que le bien de son peuple et dont le seul désir si l’on en juge par son règlement du 24 janvier, est de se rapprocher de ses besoins, et de condescendre à tous ses vœux, le Roy, en daignant jusque sur nous abaisser la majesté de ses regards, c’est lui qui nous donne la confiance de former les demandes suivantes :
« I. Par rapport au clergé nous demandons suppression de tous les privilèges qui l’exemptent de contribuer aux charges de l’État ; n’est-il pas étrange en effet que parce qu’il compose le premier ordre de l’État et la partie la plus noble, le clergé soit exempt d’en supporter des charges ? Mais s’il jouit de quelque revenu, s’il possède des biens, n’est ce pas à l’État qu’il en est redevable ? Pourqu’oy donc en faveur de l’État et pour le bien public refuserait-il d’en faire le sacrifice ? Ainsi la source et le germe fécond de tant de procès ruineux, les Dixmes, quand pourrons-nous en voir l’abolition ! De notre part ce n’est qu’un vœu et ce vœu puisse le temps le réaliser ! Mais il est une demande que nous pourrions plutôt obtenir ; et ce serait celle qui aurait pour objet la suppression du casuel. Depuis si longtemps qu’il existe des murmures le verrons-nous donc toujours subsister ? Jusqu’à quand verrons-nous un prêtre, borné par la modicité de son revenu, compter sur un fond sujet à tant de variations ? Jusqu’à quand le malheureux achetera-t’il sa sépulture ? que l’on donne à ce prêtre un revenu suffisant et qu’il vive d’une manière conforme à son État et que les fonctions il les fasse toutes sans exiger de rétribution.
« II. Par rapport à la noblesse, nous demandons suppression de tous droits seigneuriaux ; comme droit de chasse, droit de lots et ventes, exemption de tailles, banalité des pressoirs, moulins, fours etc., et pour ne nous arrêter qu’à l’article des pressoirs, qui l’ignore, combien peuvent à une bonne vendange préjudicier les pressoirs banaux ? Forcé d’aller à des pressoirs, et souvent ils sont ou en trop petit nombre, ou sujet à des réparations fortuites, le vigneron attend son tour et sa vendange dépérit, les travaux de toute une année sont perdus sans retour, les seigneurs devraient au moins justifier ce droit par des titres authentiques.
« Quant à ce droit d’avoir en tout temps des colombiers ouverts, droit que partagent avec les seigneurs des particuliers, il serait à souhaiter qu’il fut suspendu depuis le mois d’avril jusque vers la fin du mois de novembre si nécessaire dans une paroisse pour y maintenir le bon ordre fussent tenus tous les ans en présence des habitants des officiers de justice réunis au jour indiqué par les seigneurs.
« III. Par rapport au Tiers-état nous demandons réformation dans la magistrature, une marche moins lente dans la justice, les frais et dépens moins considérables : abolition des huissiers priseurs, égalité des poids et mesures dans le Royaume autant qu’il sera possible ; suppression des droits d’aides et de gabelles, le sel et le vin marchands comme les autres denrées ; les droits d’entrée supprimés ou du moins mitigés, l’exportation des grains hors du Royaume sinon révoquée du mois contenu dans des justes bornes et permises avec mesure. Nous demandons qu’il soit fait défense aux ecclésiastiques de faire valoir et de louer par eux-mêmes les Dixmes ; la location des Dixmes à des Ecclésiastiques ne peut que tourner au détriment d’une communauté qui se trouve ainsi chargée de la taille assise sur ces Dixmes dont l’Ecclésiastique est exempt mais que paye le particulier qui les tient à loyer, il serait à souhaiter que la Dixme fut égale partout ; car pourquoi dans un canton payer au vingt tandis que l’on parle de dix dans le canton voisin ? Pourquoi ce peu d’uniformité dans la manière de la percevoir ? Rien de plus à charge encore à une communauté que ces maisons et autres biens acquis par des Bourgeois dans une campagne, lesquels exempts ou presque exempts de taille la font nécessairement refluer sur elle. Nous dirions la même chose des veuves, lesquelles jouissent des biens de leurs mineurs sans payer de tailles, si le seuil nom de veuves ne nous fermait la bouche et n’arrêtait nos plaintes ; mais dans un village n’y auroit t’il pas moyen de soulager la veuve sans charger l’habitant ?
« Nous demandons que les presbytères ainsi que l’Écolage soient aux frais non de la communauté, mais du Dicimateur (sic), chargé de pourvoir et de veiller à la subsistance du curé, Pourqu’oy ne le mettre pas à l’abri des injures de l’air ?
« Quant au maître d’École nous le regardons comme l’aide au curé, le Dicimateur qui donne à l’un doit donner à l’autre.
« S’il nous était permis d’exposer nos besoins privés et de faire des demandes particulières, nous dirions que nous avons des cloches cassées, mais que faute de biens communaux elles sont à refondre ; nous dirions que notre terroir qui est de peu de rapport est encore fort sujet aux gelées ; qu’il souffre de la proximité de Reims ? Que les chemins surtout mangent un terrain considérable ; en plus nous dirions que nous sommes sans bois et qu’il nous est difficile de nous en procurer à cause du voisinage de la ville, où il s’ensuit une trop grande consommation, toutes considérations qui pourroient et devroient même alléger nos tailles.
« Mais il est une demande que nous ferons encore, te c’est celle de la vente des places à l’Église ;
Monseigneur l’Archevêque protecteur né des fabriques paroit en soutenir la location, mais faut t’il que des fabriques s’enrichissent à nos dépens ? cet usage d’ailleurs provient des changements qu’occasionne la location ; car tous les ans on verra un flux et reflux continuel de personnes qui se chasseront successivement de leurs places, et ce désordre ne doit point avoir lieu dans une Église. Fait et arrêté le présent en présence des personnes soussignées le quinzième jour du mois de mars mil sept cent quatre-vingt neuf, après lecture faite :
« T. le ROY, A. PARMENTIER, GOBERT, A. CALANDRE, R. JOUGLET, A. BOURGOIN, Lié SELAPPE, Etienne VIVILLE, Pierre COULON, Jean JOUGLET, GRANTAMY, Lié LAPLANCHE, Jean-Baptiste FROMENT, Antoine COULON, Drouin JACQUET, Etienne LE BOURQ, Brice LE BOURQ, PERSEVAL, PARTOIS, BOUGIE syndic ».
Le Cahier des vœux et doléance rédigé, notre communauté nomma deux délégués chargés de le porter à l’assemblée générale des trois ordres du bailliage de Reims, tenue le 16 mars 1789.
Aux réunions de l’ordre du clergé, M. C. JOLY, curé de Bezannes, était représenté par M. LOISON, curé des Mesneux.
Sans vouloir nous étendre à ce sujet, nous dirons que l’ouverture des Etats-Généraux eut lieu à Versailles le 5 mai 1789, et le 17 juin suivant, ils s’attribuaient la souveraineté, en s’érigeant en Assemblée Constituante.
Les premières réformes de la Constituante furent très radicales. les dîmes et les droits féodaux furent abolis par la loi du 21 septembre 1789. Le 2 novembre, tous les biens ecclésiastiques furent mis à la disposition de la Nation, à charge par elle de pourvoir aux frais du culte et aux traitements des ministres.
Ce décret donnait la même organisation communale à toutes les localités de France. La pluralité absolue des suffrages nommait le maire, le corps municipal et le conseil des notables. Ces élections eurent lieu le 14 janvier 1790.
Il paraît que c’est un dangereux honneur que celui d’être maire à cette époque, car on avait établi dans chaque commune un Comité de surveillance chargé de contrôler tous les actes de l’administration locale et de les dénoncer au besoin. (firent partie de ce Comité les citoyens : Jean JOUGLET, Drouin-Jacquet, Etienne LEBOURG, COULON le jeune, Etienne PONCE, Thomas MASSARI, MALTOt fils, Menu, GRANDAMY, Jacques MANGON, Antoine COULON, MASSARI, Jean MAUPOT, PARMENTIER, LAPLANCHE, André CALANDRE, François CALANDRE ...
Notre municipalité, en effet, ne fut pas à l’abri des dénonciations qui eurent cours pendant cette période de troubles. Car le 2 brumaire 1793, le maire avec neuf habitants furent arrêtés et enfermés dans la prison de la Belle-Tour de Reims.
Quelques jours après, le 2 frimaire, nos prisonniers n’ayant vu aucun changement dans leur situation, se décidèrent à adresser une supplique aux maires, officiers municipaux et notables de la Ville de Reims, à l’effet de recouvrer leur liberté et ce en les priant de faire agir tous les moyens en leur pouvoir pour y parvenir. Nous reproduisons ci-dessous cette pièce importante que nous devons à l’extrême obligeance de M. Gustave Laurent, auquel nous adressons ici, nos plus sincères remerciements :
« Reims ce 2 frimaire l’an 2ème de la République française une et indivisible, 1793.
« Humanité, liberté, fraternité.
« CONCITOYENS, « Depuis la date du 22 du second mois de l’an second de la République française (ou le 12ème jour du mois de novembre 1793, vieux stile), vous n’ignorez point concitoyens que nous sommes tous en partie de la municipalité de Bezannes et autres enfermés dans une prison qui fait horreur à l’humanité.
« Nous vous déclarons avec une sincère fraternité et en notre qualité de patriote, que nous n’avons jamais mérités de nos calomniateurs un pareil attentat, mais qui n’altérera jamais note réputation et notre conduite.
« Nos frères habitants, nos femmes et nos chers enfants en rappellent encore à vote équitable justice, alarmés depuis que nous sommes absent de nos foyers, sentent avec nous combien il nous est sensible d’abandonner contre nos volontés, nos exercices journaliers consacrés pour l’existence de nos familles et de nos frères.
« C’est vous ne dire assé Citoyens pour vous rappeler combien nous sommes utiles à votre ville en qualité de vos voisins, soyez-nous donc propices en frères et que l’humanité que nous vous connaissons tombe sur nous et nos familles, et fasse éclater les rayons de la justice que nous vous demandons. Nous attendons dans ces mêmes sentimens votre délibération et ainsi que votre permission pour pouvoir parrer à nos familles jusqu’au tems de note élargissement.
« Les Maire et Officiers Municipaux et autres habitants de Bezannes,
« COULON, maire ; PERSEVAL, pro.r synd. ; Antoine COULON, assess. ; Etienne LE BOURG, Lj. ; Vieille, municipal ; GOBERT, notable et Offir public ; Brice LE BOURG, notable ; Jean-Baptiste JACQUET, notable ; Gérard GOBERT fils. "
Les calomnies réunies sur la tête de nos concitoyens n’avaient sans doute rien de sérieux, car leur requête fut entendue favorablement en haut lieu.
Après plus de quinze jours de détention, ils obtinrent leur liberté et cela sur l’ordre express du représentant du peuple Bô, ainsi qu’en témoigne le document suivant :
« Suivant l’ordre du représentant Bo, les Membres des Comités de surveillance de la Ville de Reims étant tous réunis dans le lieu ordinaire de la séance de la Réunion, ont arrêté d’après les pièces justificatives que les citoyens Pierre COULON, PERSEVAL, VIVILLE, Antoine COULON, JACQUET, LANGLOIS, Brice LE BOURG, Etienne LE BOURG, GOBERT et son fils, seroient à l’instant mis en liberté et qu’ils seroient rayé sur le Registre de lecroux de ladite maison de détention et ce suivant le procès verbal de ditte séance de ce jour dhuy neuf frimaire lan deuxième de République françoise une et indivisible ».
Le Comité de surveillance de notre commune ne restait pas inactif, il tenait souvent séance. Par quelques extraits que nous allons prendre sur le registre des délibérations, nous montrerons ainsi au lecteur à quoi se résumait l’importance des travaux dudit Comité :
21 brumaire an 11 - Ordonne " aux femmes de Bezannes de porter la cocarde nationale, sous peine d’être déclarées suspectes « .
Le 22 brumaire - Conformément à l’arrêté pris par le représentant citoyen Bô, ordonne " que les cloches, argenterie, dorures et autres effets d’or et d’argent qui se trouvent dans la dite église de la dite commune seront retirés et portés au directoire du district de son arrondissement « .
25 brumaire - Réunion du Comité à l’effet de nommer un membre pour compléter ledit Comité " à défaut d’un de ses membres se trouvant détenu " . Le citoyen Thomas PONCE le remplace.
18 frimaire - Lié SELAPPE, ci-devant garde de la ci devante dame de Saint-Pierre, comparait à la séance pour " déclarer qu’il ne possède plus aucun titre relatif à ses anciennes fonctions « .
5 ventôse - Le citoyen Lié Ponce, le jeune, est obligé de venir faire la déclaration devant le Comité qu’il " possède 4 ruches de mouches à miel appartenant à la veuve LESPAGNOL de Bezannes, et trois autres en commun avec ladite dame " . Le citoyen BOUCHÉ, tisseur, vient déclarer également " avoir six ruches appartenant à la ci-devant dame de Bezannes et huit autres en commun avec elle « .
22 ventôse - Ordonne de faire l’inventaire des biens meubles et objets appartenant au château. " Cet inventaire ne comprend pas moins de 120 articles. Quoique très intéressant et curieux, sa longueur nous empêche de le citer en entier. Signalons encore quelques autres actes concernant cette période :
Le 2 mai 1790 - Lecture faite au prône de la proclamation du roi sur le serment à prêter par les Gardes nationaux, d’être fidèles à la nation, à la Loi et au Roi. " Puis à douze heures de même jour, en la grange de GRANTAMI, on a dressé un autel et nous avons fait le serment requis. " (Registres paroissiaux.)
Le 27 floréal, an II - "Payé 20 livres pour la pose d’un drapeau tricolore sur la flèche du Temple de la Raison. "
Le 20 messidor an IV - Vente du presbytère pour 1.620 livres.
Le 5 fructidor an IV - Vente, au district, d’une maison sise à Bezannes, servant de logement à l’instituteur et de maison d’école, moyennant la somme de 630 livres, à Simon MAREILLE, de Courmas. Pendant la tourmente révolutionnaire, les LESPAGNOL de Bezannes, après la confiscation de leurs biens, eurent à subir les exigences d’autres comités dont ressortissait notre commune, ainsi qu’en témoignent les faits suivants :
I. L’ordre est donné " à M. LESPAGNOL de Bezannes d’envoyer au Comité de permanence de Reims la somme de 50 livres pour son contingent de dépense pour achat de chemises, bas et souliers délivrés aux citoyens requis pour voler à la défense de la République " .
II. Le seigneur de Bezannes ayant émigré, le procureur ordonne que la citoyenne LESPAGNOL, sa femme, fournisse l’habillement et la solde de 8 hommes en remplacement de ses fils émigrés.
III. La citoyenne LESPAGNOL est reconnue suspecte :
1° Comme femme d’émigré ;
2° Comme ayant manifesté des sentiments aristocratiques et antirépublicains.
Et sera mise en arrestation et conduite à la maison de détention. (Comité de la Sect. De la Fraternité du fg de Vesle.)
IV. " Par ordre du Comité de surveillance, perquisition pour procéder à la visite des papiers et effets du nommé DESBROSSES, ci-devant instituteur des enfants du seigneur de Bezannes. " Nous n’avons trouvé que des livres d’histoire, de dévotion et autres ouvrages non suspects. "
A l’origine, notre territoire avait une grande étendue, car on comptait parmi les dépendances de Bezannes, la Folie-Coquebert, la Basse-Muire, Sainte Geneviève et surtout la Cense-Nausson, placée sur la droite du chemin qui conduit de la Porte Fléchambault à la Porte de Paris, à peu de distance des maisons de Courlancy. Ce dernier fief fut réuni à l’archevêché de Reims en 1278. Quant à la ferme NAUSSON, elle appartenait aux religieux de Saint-Rémi ; un petit bois marque son emplacement. (Géogr. de Lesage, 1839)
Le territoire de la commune est borné au nord, par ceux des Mesneux et de Reims ; à l’est, par celui de Champfleury ; au sud, par ceux de Villers-aux-Nœuds, d’Ecueil et de Sacy et à l’ouest, par celui des Mesneux.
Sa longueur atteint presque 5 kilomètres et sa largeur près de 3. La superficie totale, d’après le cadastre, est de 917 hectares, en déduisant 55 hectares pour les routes, chemins, rues, cimetière, etc., il reste donc 862 hectares, qui sont diversement productifs, savoir :
Terres labourables | 843 hectares | |
Jardins et vergers | 7 hectares | |
Prairies | 2 hectares | |
Vignes | 8 hectares | |
Bois | 2 hectares | |
Propriétés bâties et non bâties | 55 hectares | |
Total | 917 hectares | |
Il y avait autrefois des vignes qui donnaient un vin assez délicat et que l’on a arrachées successivement. Il n’en restait presque plus dès 1830. Depuis quelques années, plusieurs propriétaires ont créé de nouvelles plantations, ce qui nous permit, différentes fois, d’apprécier à son avantage le cru de Bezannes.
Les parcelles de vignes actuelles appartiennent et sont situées aux lieux-dits suivants :
Les Rouyat et Hautes-Feuilles (Firmin CHARBONNEAUX) ; Les Hautes-Pièces (Jules BOUTON) ; Les Vautes (DARCQ - FLAMAIN) ; Le Champ-Ferrat (LABASSÉ - GERVAIS).
Nos Archives communales sont muettes sur la campagne de 1814. Notre village ne fut d’ailleurs témoin d’aucun fait particulier marquant, mais il convient néanmoins de mentionner ici quelques-uns des événements qui eurent Reims pour théâtre, événements dont la répercussion se fit sentir à Bezannes.
Le 25 février, les troupes de YORCK et SACKEN étaient à Reims et des détachements logés à Saint-Brice, Thillois, Champigny, Tinqueux et Bezannes, y dépouillèrent complètement les habitants.
Bezannes fut encore occupé dans la nuit du 6 au 7 mars, par l’avant-garde des troupes alliées que commandait le général EMMANUEL.
C’était peu de jours avant le combat de Reims et à ce propos, nous lisons dans le bel ouvrage de A. DRY,
Reims en 1814 : " L’attaque de Reims avait été résolue au quartier général de Sillery, dès que fut connue la retraite de l’armée française sur Soissons : le général en chef envoya l’ordre aux avant-postes établis à Bezannes de continuer à pousser de fortes reconnaissances vers Fismes, afin de donner le change sur ses intentions...". (Pages 173 et 174)
Après la prise de Reims, les cantonnements assignés aux troupes furent énormes ; les Prussiens s’établirent dans notre village, à Cormontreuil, à Ormes, etc., et le général YAGOW, lui-même, se logea à Bezannes.
Le 13, un Te Deum fut chanté à Bezannes pour les Prussiens.
Notre localité ne se trouva plus mêlée dès lors aux événements de 1814, sur lesquels nous n’avons pas voulu entrer plus profondément, nous contentant de renvoyer aux ouvrages spéciaux.
Dans l’arpentage de 1819, le plan cadastral du terroir fut divisé en quatre sections, ainsi qu’il suit :
Section A dite du Village
Le Moulin de l’Écaille, la Naux, Les Royes, la Folie, le Lézard, le Pré-des-Glages, les Pierres, la Croix-Blanche, les Coupoulets, la Grosse-Saulx, les Tortues-Roies, la Naux-Chevalier, Chevremont, Derrière-les-Alleux, le Mont-Trempé, les Gardes, les Vautes, les Alleux, les Cummelles, le Jardin-Petit, le Bas-des-Alleux, Sous-les-Vautes, le Village, le Presbytère et le Vieux-Château, le Grand-Pré, le Petit-Pré, les Naux, rue du Pont, rue de Baconnes, le Grand Bois, le Petit Bois.
Section B dite du Champ-Drillon
La Croix-Rouge, la Fosse-à-Carin, Entre Deux-Chemins, les Hautes-Pièces, les Basses-Pièces, Crenaux-Crossat, les Charolles, le Champ-Drillon, le Champ-Saint-Remy, Entre-deux-Voyes, les Longs-Fossés, les Ouettes, la Bergerie.
Section C dite de Beauregard
Entre Deux-Voies, Pierre-Salmon, les Rosières, Beauregard, le Bas-Torchant, Hautes-Feuilles, les Rouyat, les Queues-de-Chat, les Créandus, le Grain-d’Argent, les Hauts-Pas ou le Chemin-de-Chamery, les Pas ou Chemin-d’Ecueil, les Marronniers, Reuvresse ou Marronniers.
Section D dite des Essios
Les Monts-Couteaux, Cheneloise, les Barvaux, Chervaine et les Chaillaux, Drimmoitié, les Marcilliers, Champ-Ferat butant sur la Crayères, les Champs-Ferat, le Gros-terme, les carreaux, le Mont-Amé, les Coupés, les Nirvalles, la Prieuse, les Champs-Coulomme, les Doloires, Sous-l’Orme, Sous-les-Nirvalles, Sous-les-Coupés, Tête-de-Fer, la Haute-Foire, les Gros-Grais, les Essios, les Crayères, les Létis.
La commune étant éloignée des grandes voies de communication, ne pourvoit, tout simplement, comme service vicinal, qu’à l’entretien de quatre chemins, d’une longueur totale d’environ 7 kilom. 500.
Voici la liste de ces différents chemins :
1° de Bezannes à Reims, 1 kil. 805 ;
2° de Saint-Rémi (Reims), 2 kil. 110 ;
3° de Bezannes aux Mesneux, 1 kil.040
4° de Bezannes à Sacy, 2 kil. 465.
D’après l’Annuaire de la Marne (1829), non loin de notre village, il existe un chemin connu sous le nom de Barbarie. Il paraît commencer à Vitry-le-françois et mène à Soissons. On suppose que c’est la route que suivit Clovis quand il passa, en 486, pour aller à la rencontre de Syagrius qu’il battit à Soissons.
Ainsi que l’on peut s’en rendre compte par les documents ci-dessous, la population de Bezannes a eu, comme dans presque tous les villages environnants, ses périodes de croissance et de décroissance. La différence entre l’année 1726 où l’on constate 514 habitants et l’année 1828, où le nombre en est descendu à 314, a donné lieu à des appréciations diverses.
Les uns l’attribuent à une maladie épidémique qui aurait ravagé le pays et dont les victimes furent enterrées dans un lieu appelé le Mont-Trempé, au nord et à six cents pas du village ; d’autres pensent que dans ce nombre étaient compris les habitants du château de Muire et de la ferme de la Folie-Coquebert, ceux de la Basse-Muire et même de Saint-Eloi (Reims). (Annuaire de la Marne, 1829).
Pour expliquer les renseignements ci-après, nous devons vous dire qu’autrefois un feu représentait un nombre d’habitants correspondant à 3 et demi. Les communiants étaient 76 %.
Bezannes possédait donc :
1583 | 294 personnes | ou 294 habitants | |
1608 | 230 communiants | ou 302 habitants | |
1709 | 97 feux | ou 339 habitants | |
1710 | 230 communiants | ou 302 habitants | |
1710 | 250 communiants | ou 328 habitants | |
1726 | 514 habitants | ||
1735 | 114 feux | ou 399 habitants | |
1773 | 256 communiants | ou 336 habitants | |
1783 | 256 communiants | ou 336 habitants | |
1807 | 289 habitants | ||
1820 | 347 habitants | ||
1833 | 373 habitants | ||
1844 | 388 habitants | ||
1856 | 417 habitants | ||
1861 | 435 habitants | ||
1872 | 341 habitants | ||
1876 | 319 habitants | ||
1881 | 300 habitants | ||
1886 | 317 habitants | ||
1891 | 305 habitants | ||
1903 | 293 habitants | ||
L’examen des Archives et des registres de l’état civil nous a permis de dresser la liste des instituteurs qui ont exercé leur profession depuis l’année 1626, dans la commune de Bezannes.
Le 25 septembre 1626 : " Jacques PERYNET, maistre d’écolle, demeurant à Bezannes, achète une maison au lieudit les Bricailles. " Et le mois suivant, le 14 novembre, on enregistre le contrat de mariage passé entre
« Jacques PERYNET, maistre d’écolle à Bezannes et Magdelaine ROBERT, servante domestique de M. DE BEZANNES, seigneur du lieu ». Dans ce contrat, PERYNET promet à sa future « de mettre en mains du seigneur de Bezannes, 150 livres tournois pour la bonne amour qu’il porte à ladite Magdelaine pour achat d’héritages au profit de la future ».
Il est bon de rappeler qu’à cette époque, l’instituteur était l’auxiliaire forcé du prêtre dans toutes les cérémonies religieuses : son école n’était qu’une annexe indispensable et naturelle de l’église. L’enseignement avait pour objet de former avant tout des chantres intelligents, de bons enfants de chœur et de fidèles paroissiens.
Aussi pour être instituteur de village, suffisait-il d’avoir un peu appris à lire, à écrire, à compter, à chanter au lutrin et à servir la messe.
L’école se trouvait de ce fait sous la surveillance du clergé et les doyens chargés de cette fonction en rendaient compte ainsi dans leurs procès-verbaux de visite :
1663 - « M. Gabriel BRIE, maistre d’écholes ; les enfants sont instruits ».
1698 - « Il y a un maître d’école de bonnes mœurs. Les garçons et les filles vont à la même école ».
1739 - « Nous avons fait venir le maître d’école dont on nous a rendu bon témoignage ».
1774 - « Il y a un maître d’école non fondé par conclusion de communauté, il reçoit deux livres dix sols de chaque feu ou famille, une livre cinq sols des veufs. En outre l’écolage des enfants lui revient ; peu de casuet. C’est la communauté qui le nomme et le reçoit. Quand il y a bonne vendange, suivant il reçoit en vin les bonnes volontés des habitants, plus trois livres sur la recepte des deux plats établis pour les messes ».
« Le maître fait l’école aux garçons et aux filles en même temps. L’école se tient en la maison léguée pour ce à la communauté par Remy TROUSSET. Les réparations de ladite maison sont à la charge de la communauté qui pour cet objet l’oblige à remonter l’horloge journalièrement et de payer dix livres pour l’entretien d’icelle ».
« La place de l’école seroit suffisante pour les garçons seuls, elle est insuffisante par rapport aux filles. Pour cette raison et celle de pauvreté, il ne s’y trouve, tant garçons que filles, qu’environ 30 enfans au lieu de 50. On n’y envoye que les petits enfans tant garçons que filles, réunion sujette à grands inconvénients ».
Les prérogatives du clergé sur l’école durèrent encore après la Révolution, et ce n’est que vers 1833, en vertu de la loi GUIZOT (28 juin), que le maître d’école acquit un peu plus d’indépendance et fut soustrait à l’influence directe du clergé. Pour notre commune, la rétribution de chaque ménage se trouva fixée à cinq francs et il fut spécifié, en outre, que les jeunes mariés seraient tenus au paiement de cette somme aussitôt le trimestre qui suivrait celui de leur mariage.
Le 8 novembre de cette même année, le conseil municipal de Bezannes autorisa la création d’une maison d’école au milieu du village pour la somme de 1,800 francs. Dix ans plus tard (5 février 1843), dans une délibération prise à ce sujet, nos édiles en décidèrent l’agrandissement.
Enfin, c’est en 1853 que nous voyons s’élever la maison commune actuelle, qui sert à la fois, ainsi que nous l’avons déjà dit plus haut, de mairie et d’école. Pendant sa construction, les classes avaient été transférées dans la maison habitée aujourd’hui par Mme Ve GRIFFON-RIGOT.
La dépense s’est élevée à la somme de 45.000 fr. Une somme de 2.000 fr. avait été attribuée par l’Etat à titre de subvention.
Voici la liste des instituteurs qui ont exercé dans notre village :
PERYNET, Jacques | 1626 | PETIT (Mme) femme du préc. | 1805 | |||
DUGUET, Claude | 1638 | LAURENT, Claude-Antoine | 1809 | |||
BRIÉ, G | 1663 | MIGNOLET | 1811 | |||
BOURÉ, François | 1700 | POIRIER | 1826 | |||
VALENTIN, Paul | 1709 | DÉTRÉS, Jules Simon | 1833 | |||
TRONSSON, J-B | 1722 | BAILLON, Auguste | 1833 | |||
LEMOINE, Jean | 1734 | GERVAIS, Pierre | 1849 | |||
CHARLIER, Nicolas | 1748 | BAILLET | 1850 | |||
THUMY, Thierry | 1753 | CACHOT, CH. Joseph | 1854 | |||
MOINEAU, Hubert | 1782 | BORDET, | 1858 | |||
LANGLET, J. Nicolas | 1787 | BOULONNOIS | 1861 | |||
TELLIER (Mlle) | 1787 | CAGNIARD | 1865 | |||
DOSSERAUX | 1787 | FAUVET | 1866 | |||
PETIT | 1787 | ROCHET, Arthur | 1876 | |||
Nous ne voulons pas passer ce dernier nom sous silence. M. Arthur ROCHET occupe, en effet, le poste d’instituteur à Bezannes depuis 1876, après avoir enseigné à Reims et à Bligny. En 1884, il obtenait une médaille de bronze (grand module) ; en 1899 un Diplôme d’honneur et, en 1903, une médaille de bronze de M. le Ministre de l’Instruction publique.
Les vingt-sept années que compte son séjour dans notre commune montrent l’estime qu’il sut acquérir des habitants comme instituteur et comme secrétaire de mairie, et nous croyons être leur interprète en faisant ressortir ici sa vie toute de labeur et de modestie.
Nous nous faisons aussi un devoir de remercier bien sincèrement M. ROCHET pour la complaisance avec laquelle il a bien voulu y mettre les Archives communales à notre disposition.
année | maire | adjoint |
---|---|---|
1793 | COULON Pierre | GOBERT Nicolas-Louis |
An II | MUZARD André-Louis | GRIFFON - RIGOT |
An X | PERSEVAL | PARMENTIER Gérard |
7 fruc | FROMENT J-B | LE BOURCQ Etienne |
1806 | FROMENT J-B | LE BOURCQ Etienne |
1814 | MARLIER Nicolas | PÉRARD Etienne |
1816 | MARLIER Nicolas | GRIFFON Jean-Louis |
1818 | LEFRANÇOIS J-H | SABATIN Toussaint |
1827 | MARLIER Alexandre | SELAPPE, Claude |
1831 | PERSEVAL J-B | PONCE Nicolas |
1835 | PERSEVAL J-B | LE BOURCQ Remi-A |
1838 | PERSEVAL J-B | ROUYER Jean-Paul |
1843 | PISTAT J-B.-Henry | GRIFFON LACUISSE |
1854 | LEVIEUX Duval | Gérard PISTAT |
1863 | COULON Gérard | X |
1871 | MARLIER Beauvais | LAMY Théophile |
1876 | MARLIER Beauvais | PISTAT-LECOINTRE |
1881 | MARLIER Beauvais | PISTAT-LECOINTRE |
1884 | MARLIER Beauvais | LAMY-COULON |
1888 | MARLIER Beauvais | SELAPPE, Louis : GAILLOT Gustave |
1892 | MARLIER Beauvais | LAMY - COULON |
1893 | GAILLOT Gustave | LAMY - COULON |
1896 | SELAPPE Tritant | HÉRISSON Albert |
1897 | HÉRISSON Albert | LABASSÉ Joseph |
1900 | HÉRISSON Albert | LABASSÉ Joseph |
Peu après les désastres survenus dès le début de la guerre (19 juillet 1870), les troupes prussiennes venaient occuper les environs de Reims.
Une partie des habitants de Bezannes, effrayés par le récit des cruautés exercées sur la population des campagnes et notamment par le bombardement et le pillage dont avait souffert, le dimanche 4 septembre, le village de Lavannes, avait abandonné la localité pour se rendre dans la forêt, au-dessus de Sermiers, afin d’y mettre leur bétail en sûreté.
Le 5 septembre, Bezannes se voyait envahi par les troupes ennemies et était mis en demeure de pourvoir à la nourriture de 470 hommes et 470 chevaux. De plus, nous voyons, par l’ordre remis à la mairie, qu’il devait être fourni : deux vaches ; le café et le pain aux hommes, le matin ; la soupe, légumes et une livre de viande par chaque homme à midi, de même pour le soir ; 6 kil d’avoine par cheval et le tabac.
En même temps, les autorités prussiennes enjoignaient aux habitants d’avoir sans délai, à déposer, à la mairie, les armes, de toute espèce, dont ils étaient détenteurs.
Quelques jours auparavant, des fusils avaient été adressés à la commune à l’effet d’en armer les sapeurs-pompiers, mais dès qu’on apprit l’approche de l’ennemi, ceux-ci furent cachés dans un puits abandonné qu’on recouvrit de bois.
Les ennemis conçurent des soupçons et après quelques recherches ne tardèrent pas à découvrir les armes. Les précautions prises avaient été inutiles.
Ce fait suffit pour déchaîner la fureur de la soldatesque. L’officier commandant fit aussitôt cerner le village, pendant que le maire, M. COULON, était arrêté et gardé à vue. Le 11 septembre, sur réquisition de l’officier, M. GRIFFON-RIGOT, adjoint, dut le conduire à Reims, sous l’escorte de soldats prussiens. Remis en liberté le surlendemain, le village fut obligé de satisfaire aux exigences de l’ennemi qui réclama une somme de 5.000 francs, sous menace des plus terribles représailles.
C’est pour Bezannes, le fait le plus marquant de cette triste période.
Dirons-nous que notre localité eut à supporter de multiples passages de troupes, des réquisitions sans nombre. Qu’il nous suffise de relater que du 7 au 13 septembre, elle eut à fournir 60000 kil. De foin et 17.500 kil d’avoine, et que les dommages causés par l’ennemi s’élevèrent à 124.605 francs.
On le voit, Bezannes ne fut pas exempt des malheurs qui frappèrent si cruellement la France et nous devions ajouter cette page à son histoire.
Une subdivision de sapeurs-pompiers existe depuis longtemps dans la commune. Elle se compose d’une vingtaine de membres commandés par un sous-lieutenant. Les derniers commandants sont : MM. PISTAT-LECOINTRE ; Eugène LAPLANCHE ; Landouzy-FROMENT ; Louis PISTAT et DRAVENY, sous-lieutenant, actuellement en exercice.
Les sapeurs Arsène FROMENT, Félix SOGNY et Léon PARMENTIER, sont titulaires de la médaille d’honneur des sapeurs-pompiers.
En dehors des inscriptions que nous signalons au chapitre de l’église, on ne remarque guère dans note village que celles conservées dans une maison près de l’église et appartenant à M. MARLIER. A ce sujet, nous ne pouvons mieux faire que de citer textuellement le Répertoire archéologique de l’arrondissement de Reims :
" En face du portail de l’église, sur la gauche de la grande porte d’une maison de culture, on voit dans une niche à deux mètres de hauteur, une statue en pierre du XVIe siècle représentant un évêque en chasuble.
On lit au bas :
STE HUBERTE ORA PRO NOBIS
et au dessus :
JAY ETE FAIT LE 16 DU MOIS DE L’AN 4 DE LA LIBERTE 1792
Dans la cour de cette maison, au-dessus de la porte du corps de logis a été encastré dans la muraille probablement à la même époque, un petit monument de la Renaissance dont ci-contre la reproduction. Il se compose d’une niche cintrée surmontée d’un fronton, évidée en forme de coquille, et garnie de marbre incrusté sur les côtés ; au milieu est un Christ en croix, avec un chanoine à genoux les mains jointes ; près de celui-ci, un listel portant ces mots en lettres gothiques : mei miserere mei. Au pied de la croix, tête de mort et ossements. Au-dessous de la niche, tête d’ange sculptée formant console. L’ensemble d’un beau travail est bien conservé. "
Le 8 octobre 1821, un terrible incendie éclatait dans notre commune. Malgré la rapidité des secours, on eut à déplorer la perte de 64 corps de bâtiments. Cet incendie aurait pu s’étendre d’avantage les couvertures en chaume existant en grand nombre à cette époque.
Un graffiti visible à la maison de M. Eugène LAPLANCHE, située à proximité de la mairie, rappelle l’épouvantable sinistre à la mémoire des bezannais.
Le 15 août 1901, un violent orage s’étant déchaîné sur Bezannes, la foudre tomba sur le clocher de l’église et causa des dégâts évalués à environ 500 francs. Le clocher, qui avait été recouvert l’année précédente, fut restauré et muni d’un paratonnerre.
Pendant le courant de l’année 1902, le moulin à vent, situé à gauche du chemin de Bezannes aux Mesneux, lieudit Champ-Férat a été complètement rasé avec les maisons et dépendances qui l’entouraient.
D’après un ancien du pays, le brave père CALENDRE, la création de ce moulin pouvait remonter à l’année 1820. Le premier propriétaire est M. FRANSQUIN-HANIN.
La terre et seigneurie de Bezannes était de longue date dans la famille de ce nom, dont on peut suivre la filiation dans la généalogie dressée par le juge d’HOZIER (armorial de la noblesse de France, Reg IV.) Cet auteur cite plusieurs personnages comme ayant paru dans différents actes sous les années 1248, 1266, 1296 etc. Parmi eux est inscrit Jean de Bezannes que d’Hozier regarde comme étant celui qu’intéresse un fait historique rapporté dans un mémoire de famille : " En l’an 1268 (porte ce mémoire), Alphonse comte de Poitiers, frère du roi Saint-Louis, lequel étoit demeuré à Paris pour le gouvernement de l’État, avec la reine Blanche sa mère, désirant joindre l’armée du Roi son frère qui étoit au voyage d’Outremer, partit de Paris accompagné de plusieurs grands du royaume, entre autres Jean DE BEZANNES, son conseiller, et joignit l’armée du Roi à Damiette. L’année suivante se donna un grand combat contre les Sarrasins étant commandé par MELECH SOULDAN, et celle des François par le Roi en personne, laquelle courut risque d’être défaite sans la valeur de Jean de Bezannes qui, ralliant le reste des troupes de l’armée du Roi, mit en pièces celle de MELECH. Il portait pour lors son écu : Azur semé de besans d’or sans nombre et pour marque de courage au lion d’argent, armé de gueules, lampassé d’or. " Ces armes sont celles que porta, dans les siècles suivants, la famille qui nous occupe.
D’Hozier donne comme premier auteur certain, Pierre de Bezannes, vivant au XVe siècle. Il était, en 1436, contrôleur du grenier à Sel de Reims, puis Panetier du Roi et attaché au service du Chancelier.
Nous devons mentionner son passage comme lieutenant des habitants de la Ville de Reims, de 1450 à 1466.
Des deux mariages qu’il contracta, le premier, avec Jeanne DE MARNE (1437) ; le second, avec Jeanne TOIGNEL, il eut trois enfants. Nous ne nous occuperons ici que des membres possesseurs de la terre de Bezannes.
Jean de Bezannes, issu du deuxième mariage, la possédait avec les seigneuries de Condé, des Mesneux et de Prouvais. Il s’était marié à Perrette DE BOHAM, dont Adrien, écuyer, seigneur de la terre de Bezannes pour laquelle il rend hommage le 25 mai 1499 à Claude TOIGNEL, seigneur d’Espence.
Marié à Louise de MIREMONT, fille de Jean, seigneur de Gueux, il laissa une nombreuse postérité qui forma la branche des seigneurs de Taissy et de Guignicourt.
Renaud de Bezannes, écuyer, hérita de la seigneurie de bezannes. " Il partagea, le 4 juin 1551, avec Guillaume, Nicolas, Adrienne et Marguerite de bezannes, ses frères et sœurs, les biens de la succession paternelle et maternelle, et eut pour sa part comme fils aîné la terre de Bezannes mouvante de l’archevêque de Reims et du vidame de Châlons ; la terre du Mont-Saint-Pierre, mouvante du comté de Roncy ; le fief de Montbret, mouvante de l’archevêque de Reims à cause de son château de Porte-Mars ; la terre de Rocquignicourt, mouvante de l’abbaye de Saint-Thierry ; le fief des Maigneulx relevant aussi de l’archevêque de Reims et le fief du Chastelet. " (D’Hozier. Art. Bezannes.)
Guillaume, cité plus haut, fut le chef de la branche de Taissy.
Renaud de Bezannes avait épousé, en 1564, Marguerite de ROUY, qui lui donna quatre enfants parmi lesquels Charles, qualifié écuyer, seigneur de Bezannes, gentilhomme ordinaire de la maison du Roi et chambellan du cardinal de Bourbon. Il rendait foi et hommage, le 10 mars 1566, pour le fief de Bezannes et le 9 décembre 1575 pour la maison forte, circonstances et dépendances d’icelle, à l’archevêque duc de Reims. Charles de Bezannes eut de son union (1573) avec dame Louise DE CRÉVECŒUR, veuve de messire Anne DE BOULAINVILLIER, Jacques qui hérita de notre terre et seigneurie. Marié à Anne DE NIVENCHAM, fille de Maurice de NIVENCHAM, seigneur d’Estrepy, et de Catherine LALLEMENT, il eut sept enfants dont entre autres Renaud de Bezannes de Taissy qui paraît dans un acte daté du 18 novembre 1647, par lequel il rend foi et hommage à Mgr LÉONORE d’Etampes pour la maison forte de Bezannes ainsi qu’elle se comporte, avec les fossés l’environnant et dépendances d’icelle, conjointement avec messire Jacques de Minette du Breuil, à cause de Louise de Bezannes, son épouse, et messire Florent DU HANNON, à cause de Marguerite DE BEZANNES, son épouse, savoir lesdites dames pour chacune un quart et ledit Renauld pour moitié dudit lieu de Bezannes.
Le 25 novembre 1648, Renaud fournit également au même archevêque, aveu et dénombrement pour son château et maison forte de Bezannes, entouré de fossés remplis d’eau avec la basse-cour et bois joignant et attenant audit château. Renaud avait épousé Anne DE BOUTILLAC de laquelle il eut deux enfants :
1° François-Joseph de Bezannes de Taissy ;
2° Louis de Bezannes,
Dès lors, nous voyons la famille de Bezannes résider à Taissy et à l’époque où les deux personnages ci-dessus vivaient, apparaît (1673) Pierre GARGAND, écuyer, Conseiller du Roi et Commissaire ordinaire des guerres, seigneur de Bezannes, pour lequel il rend, à la date du 24 janvier de l’année précitée, foi et hommage de la seigneurie dudit lieu, à Mgr Charles-Maurice Le Tellier, archevêque de Reims.
A la fin du XVIIe siècle, notre seigneurie se trouvait partagée. Une partie appartenait au SR DELAUNOY, à la suite d’un échange fait avec les chapelains de l’Église de Reims, et l’autre partie aux FÉRET de Varimont. Le 13 septembre 1698 et le 20 avril 1700, les droits de ceux-ci étaient acquis par Antoine Leclerc, Conseiller du Roi et son procureur au siège présidial de Reims (Arch. de Reims, fonds de l’archevêché, G. 135.)
Le 19 janvier 1727, les héritiers de la dame Leclerc vendaient la part leur appartenant à Messire LESPAGNOL de Villette. Ce dernier se rendait acquéreur, à la même date, du fief d’Artaise, consistant en un quart dans les droits de sauvements et d’un quart dans les abonnements de vinage du village des Mesneux qui relevait au même titre, que la maison seigneuriale de Bezannes, de l’abbesse de Saint-Pierre. Une des lettres de M. LESPAGNOL, datée du 4 décembre 1746, conservée aux Archives de Reims, a pour nous quelque intérêt en ce qu’elle donne la consistance de la maison forte et de certains droits y attachés, droits que lui contestait l’archevêque de Reims et qui firent l’objet de cette correspondance que nous croyons devoir reproduire in extenso :
" Au moment, Monsieur, que j’ai acquis la terre de Bezannes par compromis, j’ai eu l’honneur d’informer son altesse que j’allois devenir son vassal et qu’en cette qualité je luy devois des droits.
" Elle a eu la bonté de me répondre qu’elle donneroit les ordres pour que je sois traité favorablement. Cette lettre est antérieure à mon contrat d’acquisition qui est du 28 janvier 1727.
" J’avais paié les droits deus pour ce qui est dans la mouvance de l’archevesché, si on m’avoit demandé ce qui pouvoit être deu pour la maison forte et la seigneurie des Mesneux, appelle le fief d’Artaise.
" On a prétendu, Monsieur, que le bois joignant la maison étois fief. Il y a quinze ou seize arpents - cette prétention est fondée sur ce que dans un dénombrement présenté à Mr de LENONCOURT ou à Mr D’ESTAMPES, je n’ai pas ici mes titres, c’est à l’un ou l’autre des deux qu’il a été donné, il se trouve en interligne ces deux mots et bois. Ils sont écrits d’une main étrangère d’une encre plus foncée. Il est certain qu’ils ont été ajoutés depuis l’acte. La mesme main ly a ajouté dans l’extrait qui est au Cartulaire de l’archevesché. Dans l’extrait que j’ai en main, on m’a assuré avoir vu la minutte ou les mots et bois ont été ajoutés par la mesme personne. Quel a pu être son but dans cette infidélité qui est ancienne, il n’a pu être que d’étendre les droits deus dans les mutations ; il s’est de tout temps trouvé gens toujours prêts à prêter leur ministère aux mauvaises manœuvres. Les dénombrements antérieurs et postérieurs n’ont jamais fait mention des bois.
On m’a demandé les droits de quint. Monsieur, pour la laisse court séparée de la maison forte par le fossé. Dans cette basse court, il y a un logement pour le fermier, des granges, écuries, remises, un colombier et deux pressoirs banaux, et en conséquence la banalité auroit aussi deu des droits de quint. Je portay à mon conseil les anciens contrats d’acquisition, un décret de 1667 et mon contrat avec les aveux et dénombrements ; il remit à me donner sa décision que fort longtemps après sur ce qui pouvoit être de la mouvance de l’archevesché. Il me dit que les actes n’étoient pas clairs, que la basse cour étant une dépendance naturelle du château, il y avoit lieu de présumer qu’elle étoit de la mouvance, ce qui me fit prendre le parti de dire à Mr Noël, mon procureur alors, aujourd’hui receveur de L’hôtel Dieu qui avait entre ses mains mes deniers qu’il pouvait paier mille livres à l’intendant de monsieur l’archevesque ce qu’il a fait dans son étude où la quittance a été donnée en juin 1728 avec le terme d’acompte à cause des difficultés qu’on faisoit sur les dépendances de l’archevesché.
"Peu de temps, monsieur, après mon paiement, j’allois chasser aux Mesneux me regardant en avoir le droit. Trois jours après, je reçois copie du procès-verbal dressé par le garde des Mesneux, et assignation devant le bailli de l’archevesché. J e retourne à mon Conseil, je luy fais voir les termes de mon contrat relatif à ceux du décret, item la seigneurie des Mesneux appelé le fief d’Artaise avec le droit de sauvement. Il me montra dans le corps du décret un (sic) opposition formé au nom de Mr Letellier pour lors archevesque et me dit que qu’au moien de cette opposition, je ne pouvais me servir du décret pour faire valoir ma qualité de seigneur des Mesneux et y chasser, que Mr Leclerc n’en avait jamais en la possession. Il venait de mourir âgé de 86 ans et n’avait jamais tenu de fusil. Cet avis me parut suspect et venir d’une personne dénoncée à Mr l’archevesque il m’offrit son service pour empêcher la poursuite de l’assignation qui m’avait été donnée.
J’envoiai alors, Monsieur, mes litres à Paris pour les consulter. On m’assura que ma qualité de seigneur des Mesneux étoit bien établie par le décret et le contrat de vente, mon droit de chasse certain, que les termes de la maison forte entourés de fossés étoient expressifs et que la basse court et les bois n’étoient pas de la mouvance de l’archevesché et sujet à des droits féodaux.
« Je compris dès lors que j’avois paié au-delà de ce qui pouvait estre deu pour la maison forte et les mouvances de l’archevesché et que mon interest étoit d’assurer par des chasses réitérées la possession de mon droit de chasse dans une terre qui est contiguë à la mienne.
« A la première chasse, nouveau procès-verbal et sans avis comme la première fois assignation pour me voir tenir en défense de chasser devant le bailli de l’archevesché. Procédé déraisonnable d’un intendant pour ne pas dire brutal qui regardoit le gibier des terres communes comme son bien, son apanage, et agissoit comme si son système étoit que ceux qui avoient concurremment avec son altesse des droits de chasse ne devoient pas en user. Il y a eu dans une qui n’est pas loing de chez moy des procédées à peu près semblable. Assigné, j’ai demandé, Monsieur, mon renvoy devant le juge roïal. Le Bailli n’a pas voulu me donner une sentence de renvoy. L’affaire apparue apparemment si mauvaise qu’on n’a pas jugé à propos de la poursuivre.
« Si le Conseil prétend que les bois et la basse court sont dans la mouvance de l’archevesché je suis redevable, mais s’il ne réclame que la seigneurie des Mesneux, elle consiste au droit de chasse et au quart de l’avoine paié à l’archevesque de Reims par les habitants qui doivent chacun trois quartels par an. Il y a des droits de sens ou autres revenus auxquels je n’ai point de part.
« Quant à la maison forte dont on a fait la visite il y a deux ans e en mon absence, voicy sa consistance : une cuisine, une salle, une chapelle, un cellier font le rez-de-chaussée. Le haut à deux chambres (sic) et trois cabinets. Un pavillon donne deux chambres de domestiques, une à chaque étage. Des écuries, parties pan de bois, parties bâties en carreaux de terre ont été démolies à cause de leur vieillesse et caducité, les parties pourries dans les murs, elles n’ont pas été réédifiées. Cette maison forte a été bâti il y a plus de quatre cents ans et les matériaux sont tous carreaux de terre à l’exception du pignon qui en croix. On a du vous la dépeindre telle que je l’ai fais. Celuy qui a fais l’ouverture de la maison a ouy dire n’est ce que cela à celui qui en a fait la visite. Telle quelle est, Monsieur, j’aurois été fort charmé de vous y recevoir et de vous faire voir ce qui est dans la mouvance de son altesse et en mesme temps une maison bourgeoise bâtie il y a quinze ans tout entière depuis le fondement jusqu’au faîte, qui a une cuisine, un sallon, deux chambres hautes, deux jolis jardins, basse cour, cellier, vendu le 14 juillet 1739, 1400 livres. Il est vrai qu’elle n’est pas seigneuriale entouré de fossés, elle est dans mon village et bâtie des mesmes matériaux que la mienne.
« Je ne vous dirai pas Monsieur que peu de temps après mon beau-frère a acheté vingt mille livres une terre qui est tout fief, qu’on luy a fait remise des droits en paiant mille livres. J’ai vu avec plaisir les grâces qu’on luy a fait. Sentant mon inutilité je me borne à paier ce qui peut être légitimement deu sans espérer de grâce. Car si son altesse a eu intention que je sois traité favorablement, elle n’a pas été remplie. Si on abandonne la basse cour et le bois comme n’étant pas de la mouvance de l’archevesché, je pouvois mesme avancer que j ‘ai trop paié et que pour me faire faire l’aveu d’un traitement favorable et d’une remise, il doit m’être rendu une portion des mille livres paiés.
« Avant la promesse d’un traitement favorable, j’ai cru en passant mon acte de vente ne devoir pas fixer ce qui étoit dans la mouvance de l’archevesché, ni en fixer la valeur, ce que j’aurois fait avec l’exactitude la plus scrupuleuse pour ne pas nuire à ses droits et avec la justice la plus sévère.
« Je vous ai l’obligation la plus entière, Monsieur, de m’avoir donné avis des résolutions du Conseil à mon égard, faveur que je n’ai pas receu quand j’ai receu les deux assignations pour la chasse des Mesneux qu’on me contestois.
« Le Conseil tout éclairé qu’il est pouvoit être sujet à la prévention comme tous les hommes. Ses décisions ne feront pas le jugement qui doit fixer ce qui est fief et la valeur.
« J’ai l’honneur d’être très parfaitement, Monsieur, Votre très humble et obéissant serviteur, Bezannes
« A Bezannes, ce quatre décembre 1746. "
La maison forte ou château dont il est question dans cette lettre, était situé dans un espace encore aujourd’hui entouré de fossés qui sont alimentés par des eaux venant de Sacy. Il n’y subsiste plus qu’une habitation restaurée au centre d’un vaste enclos. On remarque dans le grenier deux consoles en pierre avec les écussons lisses et au rez-de-chaussée, offrant un heaume, une lampe, une figure et deux têtes d’animaux aux angles.
Revenons à nos seigneurs
Gérard-Félix LESPAGNOL, grand bailli d’épée de Vermandois, seigneur de Bezannes, eut un fils Jean-Baptiste-Félix LESPAGNOL, seigneur de Bezannes, Vaux-Champagne, Artaise et autres lieux, ancien mousquetaire du Roi et capitaine dans le régiment de Vaubécourt ; il fut marié à Marie-Anne-Félicie LESPAGNOL De Villette, après une bulle dispense obtenue le 26 janvier 1761. Il fut nommé le 22 janvier 1765, en remplacement de son père, à la charge de grand bailli d’épée de Vermandois, dont il fut le dernier titulaire.
Sa santé ne lui permit pas de présider en personne l’assemblée générale du bailliage de 1789 ; il fut remplacé par Nicolas-Louis JOUVANT, écuyer, son lieutenant particulier au siège royal et présidial de Reims.
Jean-Baptiste LESPAGNOL de Bezannes décéda peu de temps après, le 25 février 1791, laissant quatre enfants :
Antoine-Joseph LESPAGNOL DE BEZANNES, officier au régiment d’Orléans, infanterie ;
Henri-Jean-Baptiste LESPAGNOL, dit le chevalier de Bezannes, officier au régiment de Navarre ;
Joseph LESPAGNOL, dit de RAMISSON, officier au régiment de Neustrie ;
Joséphine-Angélique LESPAGNOL, épouse de Louis-François DE LA BOVE de l’Isle, garde du corps du Roi, compagnie de Noailles.
La branche masculine des LESPAGNOL de Bezannes s’est éteinte vers 1848, en la personne de M. Antoine-Joseph de Bezannes, chevalier de Saint-Louis, décédé à Reims en son hôtel, rue des Chapelains, laissant de son mariage avec Madame Madeleine-Nicole-Clotilde PRÉVOST DE VAUDIGNY : Madame Marie-Félicie LESPAGNOL DE BEZANNES, épouse de M. Prosper JOURDAIN de Muizon, et Madame veuve DE BEFFROY, supérieure des dames de la Providence à Reims. (II. PARIS. Les cahiers du Bailliage de Reims aux Etats-Généraux de 1789.)
Notre paroisse, citée en 1184 (Cf. VARIN, Arch. adm. T. 1, page 406, Dîmes), avait déjà au XIIe siècle charge de succursale : la chapelle Sainte-Geneviève-aux-Champs, située près de Reims, en dépendait.
C’est ainsi que le Pouillé de 1303 en fait mention : Perrochia de Besennis duo sunt monasteria ; principale monasterium apud Besennes, fundatam in honore B. Martini ; aliud est in capella S. Genovephe juxta Remis, non dedicatum. - Patronus capitulum S. Simploriani Remensis, " "a la paroisse de Bezannes, il y a deux églises ; la principale église est à Bezannes même, fondée en l’honneur de saint Martin ; l’autre à la chapelle Sainte-Geneviève, près de Reims, sans dédicace. - Le patron est le chapitre de S. Symphorien de Reims. "
C’est en compulsant les divers dossiers et en particulier ceux relatifs aux dîmes, que nous pouvons connaître quelques-unes des particularités de l’histoire de la paroisse.
Le 26 juin 1698, on payait la dîme sans contestation à raison de la 15e gerbe pour le grain et de 4 pots de vin par poinçon.
Les possesseurs des dîmes étaient MM. l’abbé de Saint-Rémy pour moitié, les chanoines de Saint-Symphorien pour un tiers et les chanoines de Saint-Symphorien pour un tiers et les chanoines de l’église métropolitaine pour deux douzièmes. Le curé depuis son option de la partie congrue faite en l’année 1768 n’avait aucun préciput dans les dîmes.
L’enquête de 1774 qui nous renseigne à ce sujet traçait ainsi le caractère des habitants : Pacifiques et pieux. Nous savons encore par ce document que la paroisse entretenait "un maître d’école clerc, un choriste, quatre enfants de chœur, un sacristain et un sonneur. Le maître en qualité de clerc n’a point d’autre revenu que 7 livres 10 sols pour l’acquit des fondations et le logement, sur lequel il paye annuellement dix livres pour l’entretien de l’horloge. Le choriste reçoit par conclusion de la fabrique six livres, le sacristain et sonneur reçoit 5, 6 ou 7 sols par feu. "
Elle percevait de nombreux revenus de cens et vinages. Nous allons en citer quelques-uns :
1720 - François CHOLLET, pour une pièce de terre, 6 deniers ; Etienne PISTAT ... ; Mme BOUVART, pour cinq pièces de terre, 8 sols 6 deniers ; LIÉ LE ROY, pour deux pièces de vigne, 9 deniers.
1750 - François CHOLLET, pour une pièce de terre, 6 deniers ; les héritiers d’Etienne Pistat, pour trois jours de terre et cinq pièces qu’il a acquis de la veuve BOUVARD, 10 sols 3 deniers ; Toussaint FROMENT, pour un demi-jour de terre, 1 sol 2 deniers ; la veuve LIÉ LE ROY, pour deux pièces de vigne, 5 deniers.
1762 - AUBRY (Etienne), laboureur, pour 12 hommées de terre, 1 sol 8 deniers ; LAPLANCHE (Antoine), vigneron, pour 2 h. de vigne, 3 deniers ; MALAISÉ (Jean), laboureur, pour 10 h. 7 v. de terre, 2 deniers ; MARBY (Martin), pour 1 h. 5 verges de vigne, 3 deniers ; PISTAT (Nicolas), vigneron, pour 9 jours 3 h. 5 v. de terre, 1 livre 9 deniers ; plus pour 2 jours 8 h. de terre (qui doivent simple cens), 7 deniers ½ ; PISTAT (Thomas), laboureur, pour 1 jour 8 h. (simple cens), 4 deniers ½ ; TROUSSET (Henriette), veuve de Etienne PISTAT, laboureur, et Etienne-François PISTAT, son fils, pour 9 jours 4 h. 2 v. de terre, 1 livre 2 sols 2 deniers ; plus pour 1 jour 14 h. 5 v. (simple cens), 5 deniers ; VUIART (Laurent, Marie-Jeanne et Jeanne), garçon et filles majeures, pour 6 hommées de terre, 10 deniers ; VUIART (Marie-Anne et Marguerite), mineures de deffunt Robert VUIART, pour 6 hommées de terre, 10 deniers.
Les biens qui appartenaient à la fabrique se composaient en 1678 (acte du 26 mai) de 18 pièces de terre, 2 pièces de vigne et du préciput sur le grain. (Cf. G.254, Fonds de l’Archevêché.)
D’autre part, plusieurs fondations lui avaient été faites et nous ne pouvons mieux faire que de donner l’exposé de quelques-unes avec l’intitulé du document :
Inventaire des contract et constitutions de rente et contract de fondation et autres actes et argent appartenant à l’église et fabrique de Bezannes, fait par devant nous Estienne AUBRY, lieutenant en la justice de Bezannes pour Madame DE SAINT-PIERRE de Reims, dame en partie dud. Bezannes, présents ANTONIN Jacques, procureur fiscal et Gabriel BRIET, greffier, tous officiers en la dict justice soubzsigné, le dix septième jour du mois de may mil six cent soixante et dix neuf, fait à la requeste et diligence d’Antoine COULLON constre et marguillier de ladite fabrique en la dict année comme ensuisvent :
Un contract de constitution de rente fait au profit de la fabrique dud. Bezannes, portant la somme de 100 livres tournois en principal, de la somme de 11 sols deux deniers tournois de rente par an, par Adrien PISTA et Martine BY, sa femme, et Claude HOURLIER et Barbe BY, sa femme.
Un contract de fondation fondé par Maire CAZESSE fille, de la somme de 100 livres tournois, à la charge de faire célébrer un obit par chacun an.
Un autre contract de donation et fondation de deffunt Mr Remy TROUSSET, vivant prestre curé de bezannes, de plusieurs héritages à charge de faire célébrer à perpétuité par chacun an, cinq messes hault le jour de la saint Joseph, le jour de la Sainte-Croix, le jour de la Visitation de N.D., le jour de l’Exaltation de la Sainte-Croix et une procession led. Jour ; le jour de la Saint-Remy, chef d’octobre, un salut, et prédication le jour de l’Assomption ; un obit le jour du décès dud. Deffunt. - Fait et passé par devant FRANSQUIN et HERBIN, notaires royaux demeurant and. Reims, en date du 30 mars 1677.
Dans cette pièce paraît Thomas TROUSSET, coustre de l’église de Bezannes en 1675.
un autre contrat de fondation, au profit de lad. Fabrique, de la somme de 60 livres tournois, fondé par deffunt messire MILLÉ LESCAILLON, presbtre chapelain de l’église Notre-Dame de Reims, à la charge que lad. Fabrique est tenue et obligée de faire chanter et célébrer une messe à perpétuité le jour de la saint Benoist. (G. 254, Doyenné de la Montagne.)
Le 31 mai 1691, les membres composant l’Officialité de Reims rendent une sentence condamnant les décimateurs de Bezannes à réparer le chœur et le cancel de leur église. Le 15 janvier de l’année suivante, une transaction intervenait entre les codécimateurs du lieu qui fixa la contribution de chacun d’eux aux réparations de l’édifice.
Un e contestation d’un autre genre s’élevait un siècle plus tard (juin 1778) entre le curé des Mesneux et l’archevêque au sujet des dîmes à percevoir sur deux cantons situés sur Bezannes, la Naux-Chevalier et Sous-le-Nirval.
Cette affaire fut soumise à un avocat de Paris, M. LAGET-BARDELIN qui, après avoir étudié consciencieusement toutes les pièces soumises à son expertise, rendit le 17 novembre 1778 sa consultation contre les prétentions du curé des Mesneux. Il terminait ainsi : " Le titre d’érection de la succursale des Mesneux est cure de l’année 1551, donne au curé les fruits décimables dont jouissoit alors celuy de Sacy sur les cantons de la Naux-Chevalier et Sous-le-Nirval de Bezannes, mais le curé de Sacy ne dixmoit que sur une partie de ces cantons. Il y a sur cela titre et possession. Le titre est la transaction du 15 janvier 1692 passée entre M. LETELLIER, ors archevêque de Reims et abbé de Saint-Rémy, le chapitre métropolitain, celui de Saint-Symphorien et le Sr GODBILLOT, curé de Saint-Jacques de Reims. L’année suivante, du reste, un arrêt du 19 mai, rendu par le Parlement, maintenait l’archevêque dans la possession de la dîme sur ces deux cantons.
Les anciens registres des cueillerets nous apprennent ce que touchait le seigneur du lieu. En 1763, M. LESPAGNOL de Bezannes reçut, pour son quart de sauvements, " dix-sept septiers et quatre écuelles un quart d’avoine, et pour son quart du droit de vinage sept livres cinq sols. Il devait luy revenir dix livres 18 sols pour son quart des-dits vinages, mais il a abandonné 3 livres 13 sols tant pour son quart du payement du mesureur que pour son quart des frais de recouvrement dud. Droit de vinage, ainsy qu’il est accoutumé. " La chapelle Sainte-Geneviève, dont nous avons parlé plus haut, fut supprimée par une ordonnance rendue le 19 juin 1773 par Mgr de la ROCHE-AYMON, cardinal-archevêque, à la suite de la requête qui lui avait été présentée par M . Charles JOLY, curé de la paroisse de Bezannes.
Ladite requête exposait : "que l’église de Ste-Geneviève paroist inutile par le peu de paroissiens qui y sont annexés, qu’elle est dénuée de choses nécessaires à la célébration du service divin, sans fabrique, sans registres et sans ornemens ; qu’étant située sur le bord d’un grand chemin, elle est exposée à des profanations ; qu’en effet elle a desja été profanée et volée plusieurs fois par des effractions nocturnes des portes et ouvertures des murs ..."
La route de Paris, avant sa rectification à l’époque de Louis XV, passait à gauche de notre chapelle ; l’emplacement de l’église portant le même nom est aujourd’hui à sa droite et à une certaine distance.
L’église de Bezannes remonte dans ses parties principales au XIe siècle. Ce monument, qui a été décrit en détail par les auteurs du Répertoire archéologique de l’arrondissement de Reims, est d’une belle conservation et offre quelque intérêt. La tour romane est surmontée d’une flèche construite au XVIe siècle.
L’abside est circulaire, et voûtée en cul-de-four. Trois petites fenêtres l’éclairent.
Le portail date du XIIIe siècle ; sa porte est en arc brisé ; deux colonnettes à chapiteaux ornés de feuillages supportent l’archivolte. Dans la voussure, cordon de feuillages.
A l’intérieur, l’église comprend une nef à trois travées avec collatéraux. Le maître-autel est du milieu du XVIIIe siècle, époque à laquelle appartiennent les tableaux qui ornent une partie de l’édifice : Baptême de Jésus-Christ ; Christ en croix ; Présentation de la Sainte Vierge au Temple et La Sainte Famille .
En 1900, le chœur fut décoré de peintures dues au talent de M. NAMUR, artiste rémois, et peu de temps après, une semblable ornementation effectuée à la suite d’une souscription spontanée des habitants embellissait la chapelle de la Sainte-Vierge, que la foudre, lors de l’orage du 15 août 1901, avait atteinte.
La Vierge elle-même avait été quelque peu détériorée, mais une âme généreuse la fit remplacer par une nouvelle statue qui s’harmonise bien avec la décoration de l’ensemble.
Plusieurs inscriptions se lisent encore à l’intérieur de l’édifice. Tout d’abord, l’épitaphe du curé TROUSSET (1676), puis sur un losange du pavé du cœur, celle de Jean-Baptiste Amé, conseiller échevin de la ville de Reims.
Une autre se voit également à l’extérieur sur le premier contrefort gauche du portail, faisant face à la rue, c’est celle de Jehan LE GENTIL et de Poncette BAILLY sa femme (1573-1602).
Le 14 mars 1575, Jean LABBÉ et Thiébault HARDI, fondeurs à Reims, et Nicolas LEMOGNE, fondeur à Longueval, s’engagèrent à "refondre la grosse cloche de l’église de Bezannes ". (Rép. Arch. de l’arrond. de Reims, p. 26).
En 1791, trois nouvelles cloches arrivèrent à Bezannes le 25 octobre ; pour la première fois, elles furent sonnées le jour de la Toussaint au grand contentement des paroissiens.
Nos concitoyens de l’époque n’entendirent pas longtemps leur joyeux carillon. Le 10 décembre 1792, par arrêté du Comité révolutionnaire, la commune fut obligée de fournir lesdites cloches, pesant 2.237 livres, pour la défense du pays : elles furent cassées et les morceaux de métal conduits à la fonderie de Metz, pour en faire des canons.
Aujourd’hui, notre beffroi se trouve en possession de deux cloches. La première date de 1828 et la seconde a pris place cette année (1903) près de sa compagne.
La cloche ancienne porte l’inscription suivante :
"L’an 1828, j’ai été baptisée par Jean-Pierre Pothé, desservant Bezannes, et nommée Emeri-Joséphine, par Jacques-EMERI Le François, propriétaire et maire de Bezannes, et par Madame Marie-Jeanne-Joséphine-Clémentine, née HUART-LETERTRE, veuve de M. le baron PONSARDIN, ancien maire de la ville de Reims, chevalier de la Légion d’honneur et propriétaire à Bezannes. - Fondue par ANTOINE et LOISEAUX."
Sur la seconde, on lit :
"Don de M. et Mme GRIFFON-BEAUVAIS - Parrain Charles GRIFFON - Marraine Hélène GRIFFON. - PAINTANDRE frères, fondeurs à Vitry-le-François (Marne) 1902."
Une pièce conservée aux Archives communales, nous apprend que le 19 avril 1829, Prosper DUTERNE, horloger à Isle-sur-Suippe, s’engageait à prendre dans le clocher de l’église de Bezannes l’horloge pour la réparer " et à la régulariser pour lui faire sonner l’heure et la demi-heure ", pour la somme de deux cents francs.
Le plan du Terrier conservé à la Bibliothèque de Reims nous indique l’endroit où se trouvait jadis la maison presbytérale. Nous en avons la confirmation par le document suivant : "... Le presbytère qui est à la porte de l’église consiste en trois places basses de plein pied entre cour et jardin, en outre un fourni, un cellier, une cave et une petite grange. Ces trois places cy-dessus sont fort bien éclairées . il est construit à neuf depuis environ 35 ans. "
le presbytère actuel se trouve rue du Pressoir ; il a été acquis par la commune en 1863 pour la somme de 3.000 francs, à M. DIDIÈRE, prêtre desservant la commune des Mesneux et demeurant à Acy-Romance (Ardennes).
Primitivement le cimetière entourait l’église et sa superficie n’était que de deux ares quatre-vingt centiares. Il avait alors trois entrées : l’une en face le portail et les deux autres de chaque côté de l’abside.
Près de l’entrée située à gauche se trouvait le terrain réservé aux sépultures des enfants.
En 1774, le curé JOLY répondait ainsi au Questionnaire :
" Autour de l’église, il y a un cimetière non fermé, mais grillé à chaque entrée, ce qui n’empêche pas les bestes d’y entrer et laisser malpropretés - cimetière dont les murs sont en fondoir. "
On continua cependant à y donner la sépulture pendant près d’un siècle.
Vers le mois de février 1864, les habitants de la commune se cotisèrent volontairement en vue d’édifier un nouveau cimetière en dehors du village. Les souscriptions atteignirent vite la somme nécessaire : le terrain fut acheté immédiatement et entouré de murs.
Le 2 novembre 1865, il fut béni solennellement par M. QUERY, grand vicaire, délégué par Monseigneur.
Une note conservée aux Archives communales, donne le compte rendu succinct de cette cérémonie, récit qui se termine ainsi : "...cette procession, pleine de dévotion comme elle était venue, se termina vers la maison du Seigneur, précédée de la Société de nos jeunes musiciens plein de zèle qui, in sono tubœ, faisaient retentir au loin les hymnes inspirés en l’honneur de nos morts. "
L’emplacement du cimetière actuel longe la droite du chemin des Mesneux, à environ 200 mètres du village, et occupe une surface de 12 ares 68 centiares.
LABRANCHE Jehan | 1550 |
TACHERON André | 1556 |
SCAVANT Gilles | 1560 |
MESLIN Nicole | 1581 |
SURY Sébastien | 1597 |
AUBERT Claude | 1629 |
BOUCHER vicaire | 1644 |
TROUSSET Remy | 1655 |
MONO F | 1677 |
REGNARD J | 1678 |
MIMIN vicaire | 1686 |
REGNAULD Ch.-Drouin | 1688 |
LALLEMANT Philippe | 1711 |
ROUZÉ Remy vicaire | 1729 |
REMALE Mary | 1730 |
AMÉ Antoine | 1730 |
MORAINE jean | 1737 |
LOTH Louis | 1747 |
JOLY Charles-Remiet | 1749 |
DESMACETZ Pierre vicaire | 1787 |
GRASSIÈRE Jean-Baptiste | 1787 |
PRAUT vicaire de Montagny | nommé curé de Bezannes à l’élection |
HOURDICOURT | curé constitutionnel des Mesneux (5 juin au 3 décembre) 1792 |
PIRIGNON J-C.-A | 9 avril 1826 |
BOUCTON Nic-D | 10 avril 1826 |
AVELOT J-F | 18 avril 1826 |
BERNARD Nicolas | 23 avril 1826 |
POTHÉ Jean-P | 24 avril 1826 |
BARET Nicolas | 1832 |
BRICHET Constant | 1841 |
DIDIÈRE Pierre-Vital | 1848 |
NAUTRÉ J.-B Joseph | 1855 |
BOUCHÉ Adolphe-Félix | 1857 |
PHILIPPOT Nicolas-M-J | 1859 |
PELTIER Adolphe-Charles | 1863 |
DUPONT Charles-J vicaire | 1880 |
REBAUDINGO L.S | 1880 |
MARQUANT | 1884 |
MACKENSTRUM | 1892 |
En 1775 au 12e de juin, le lendemain du sacre auguste et sublime de Louis XVI notre bon roi très chrétien.
La reine son illustre épouse (dont l’arrivée à Bezannes annoncée par carillon des cloches) nous a honoré de sa présence, accompagnée de Madame, des princesses et dames de la cour pour prendre le plaisir de voir manœuvrer le régiment de hussards du comte d’Esterhazy.
Les habitants dudit Bezannes dont plusieurs sont sous les armes, étonnés, ravis d’admiration, firent joyeusement retentir l’air et répéter aux échos les cris de : Vive la reine.
Monsieur et Monseigneur le comte d’Artois étant à cheval en uniforme de dragon firent une charge à la teste des escadrons ; nos seigneurs le duc de Chartres, le prince de Condé et le duc de Bourbon, de même en uniforme, se mêlèrent aux attaques.
C’était une bonne guerre faite avec ardeur et vivacité au son des trompettes et au bruit de fréquentes décharges de mousquetteries à grand feu et coups de salve sans tuer n’y blesser aucun homme.
Cet exercice charmant qui s’exécuta avec acclamations réitérées de Vive la Reine a beaucoup réjoui la cour et les ambassadeurs dont un venu de Tripoli (qui a assisté au sacre de Louis XV et de Louis XVI, cette pieuse cérémonie l’a si fort touché qu’il a fondu en larmes et a paru disposé à se convertir) comme le beau monde de Reims, les étrangers et le peuple même des environs qui y étaient accourus en foule.
Proche les murs de Bezannes, vis-à-vis les vignes dites : les Vautes, on avait dressé deux grandes et hautes tentes tapissées, meublées, sablées. Celle de la reine, jonchée de fleurs, ornée d’un vaste panier qui en était rempli, posé sur une table couverte du tapis propre ; ladite tente était précédée de plates-bandes en gazon avec branches d’arbre plantées aux deux côtés qui formaient une agréable avenue ; laquelle tente, la cour n’a fait qu’entrevoir y étant à peine entrée et pour sortir à l’instant et remonter en carrosse afin de mieux voir ce spectacle militaire qui a duré depuis six heures du soir jusqu’à neuf.
Il y était arrivé tant de carrosses remplis qu’on a débité, qu’en retournant se suivant de tout près, ils couvraient tout le long du chemin de Bezannes à Reims, par celui d’Épernay jusqu’au bourg de Saint-Denis.
Jour mémorable pour Bezannes d’être visité par sa majesté très haute et très puissante dame Marie-Antoinette Joséphie Jeanne d’Autriche, digne élève de Marie Thérèse d’Autriche qui sera pour nous une seconde Esther.
Le curé dudit lieu qui s’est présenté en long manteau à la tente de la reine, n’a pu parvenir à l’honneur de la complimenter comme il le désirait. L’affluence extraordinaire et un concours précipité l’ont privé de ce bonheur qui aurait fit la consolation du pasteur et du troupeau. On lui aurait dit volontiers :
" Jour heureux, mille fois heureux où le pasteur et son troupeau offrent avec joye leurs respectueux hommages à une reine si désirée, si parfaite. Les sentiments et l’exemple de votre majesté, madame, apprennent au chrétien ce qu’il doit à son Dieu et au sujet ce qu’il doit à son Roy.
"Et à vous, illustres princes qui par l’union concourrez tant au bonheur de la France, soutenant le couronne de Louis 16 le bienfaisant. Tous nos cœurs sont que le ciel vous comble de bénédictions.
"Espérant que le roi viendrait le 13, à Bezannes, comme le public l’espérait, on était disposé à lui dire :
"Votre majesté, sire, par son sacre auguste, édifiant, consolant nous assure un modèle pour les mœurs un vengeur pour les vices, un appui pour l’autel, un père pour le peuple, un souverain pour l’Europe, pour la France un Josias."
(Archives communales. - Notes du curé JOLY)
En 1775 au 12e de juin, le lendemain du sacre auguste et sublime de Louis XVI notre bon roi très chrétien.
La reine son illustre épouse (dont l’arrivée à Bezannes annoncée par carillon des cloches) nous a honoré de sa présence, accompagnée de Madame, des princesses et dames de la cour pour prendre le plaisir de voir manœuvrer le régiment de hussards du comte d’Esterhazy.
Les habitants dudit Bezannes dont plusieurs sont sous les armes, étonnés, ravis d’admiration, firent joyeusement retentir l’air et répéter aux échos les cris de : Vive la reine.
Monsieur et Monseigneur le comte d’Artois étant à cheval en uniforme de dragon firent une charge à la teste des escadrons ; nos seigneurs le duc de Chartres, le prince de Condé et le duc de Bourbon, de même en uniforme, se mêlèrent aux attaques.
C’était une bonne guerre faite avec ardeur et vivacité au son des trompettes et au bruit de fréquentes décharges de mousquetteries à grand feu et coups de salve sans tuer n’y blesser aucun homme.
Cet exercice charmant qui s’exécuta avec acclamations réitérées de Vive la Reine a beaucoup réjoui la cour et les ambassadeurs dont un venu de Tripoli (qui a assisté au sacre de Louis XV et de Louis XVI, cette pieuse cérémonie l’a si fort touché qu’il a fondu en larmes et a paru disposé à se convertir) comme le beau monde de Reims, les étrangers et le peuple même des environs qui y étaient accourus en foule.
Proche les murs de Bezannes, vis-à-vis les vignes dites : les Vautes, on avait dressé deux grandes et hautes tentes tapissées, meublées, sablées. Celle de la reine, jonchée de fleurs, ornée d’un vaste panier qui en était rempli, posé sur une table couverte du tapis propre ; ladite tente était précédée de plates-bandes en gazon avec branches d’arbre plantées aux deux côtés qui formaient une agréable avenue ; laquelle tente, la cour n’a fait qu’entrevoir y étant à peine entrée et pour sortir à l’instant et remonter en carrosse afin de mieux voir ce spectacle militaire qui a duré depuis six heures du soir jusqu’à neuf.
Il y était arrivé tant de carrosses remplis qu’on a débité, qu’en retournant se suivant de tout près, ils couvraient tout le long du chemin de Bezannes à Reims, par celui d’Épernay jusqu’au bourg de Saint-Denis.
Jour mémorable pour Bezannes d’être visité par sa majesté très haute et très puissante dame Marie-Antoinette Joséphie Jeanne d’Autriche, digne élève de Marie Thérèse d’Autriche qui sera pour nous une seconde Esther.
Le curé dudit lieu qui s’est présenté en long manteau à la tente de la reine, n’a pu parvenir à l’honneur de la complimenter comme il le désirait. L’affluence extraordinaire et un concours précipité l’ont privé de ce bonheur qui aurait fit la consolation du pasteur et du troupeau. On lui aurait dit volontiers :
" Jour heureux, mille fois heureux où le pasteur et son troupeau offrent avec joye leurs respectueux hommages à une reine si désirée, si parfaite. Les sentiments et l’exemple de votre majesté, madame, apprennent au chrétien ce qu’il doit à son Dieu et au sujet ce qu’il doit à son Roy.
"Et à vous, illustres princes qui par l’union concourrez tant au bonheur de la France, soutenant le couronne de Louis 16 le bienfaisant. Tous nos cœurs sont que le ciel vous comble de bénédictions.
"Espérant que le roi viendrait le 13, à Bezannes, comme le public l’espérait, on était disposé à lui dire :
"Votre majesté, sire, par son sacre auguste, édifiant, consolant nous assure un modèle pour les mœurs un vengeur pour les vices, un appui pour l’autel, un père pour le peuple, un souverain pour l’Europe, pour la France un Josias."
(Archives communales. - Notes du curé JOLY)
Vidéo - Présentation de Bezannes